mercredi 16 janvier 2013

Amorphisme du bout du lit : le gymnaste


Un homme devant moi se tient sur ses deux mains
Il se tient à la poutre le corps renversé
Un jeune homme devant moi me fait face et
Il semble retenir sa chute dans ses mains

Un homme devant moi me parle à l'envers et
Il semble difficile d'apprécier ses mots
Car ses mots sont terribles et tout renversés
Un homme devant moi a le galbe d'un mont

Car son corps est une statue qui parvient à
Bouger L'homme devant moi se fait se refait
Il se fard comme une femme Il est beau bien fait

On le croirait sorti des jeunesses nazies
Il semble difficile de savoir s'il vit
Un homme devant moi est bombé mais tout droit


1 commentaire:

  1. (L'alexandrin rompu sur les coordinants et les prépositions est une forme particulièrement agréable pour la lecture, quelque chose du triomphe de l'humble formule (cela fait penser à William Cliff, qui est l'un des rares que je connaisse à employer une structure que la poésie moderne/contemporaine semble (?) avoir mis au pilori en éventrant l'alexandrin)

    A-morphisme : rupture de forme (qu'on peut tout aussi bien considérer comme une reprise de la forme en question (l'alexandrin) - déformation du corps masculin, reprise du corps fardé de la femme), rupture du mouvement ("bombé mais tout droit"), rupture du lien (entre deux ensembles de même structure (le narrateur et son gymnaste) - en mathématiques, c'est du moins la définition d'un "morphisme"), et rupture d'unité (unité temporelle : recherche de la cause (multiplicité du "car" et pénétration dans l'espace hypothétique par les verbes "sembler", le conditionnel) mais aussi unité du corps : moi/lui, homme/femme, galbe/statue), etc.
    Qui dit rupture dit reformation, recomposition de structure - ce texte est comme s'il avait été, à l'image du gymnaste, renversé un premier temps, puis remis sur ses deux pieds. Il titube, il cherche des repères (cf. "Quoi faire quoi dire" : même vertige ; texte saisi au même moment d'étourdissement) qu'il ne trouve pas encore, qu'il ne sait pas où trouver vraiment.

    On pourrait aussi s'interroger assez longuement sur la reprise de quelques éléments homo-érotiques, dans un texte qui fonctionne sur le flou, à la fois, des précisions genrées et de la posture du narrateur à son sujet.

    Mais la vraie présence troublante est celle de ce bout "du bout du lit". De là viendrait peut-être ce qui renverserait, à son tour, mon commentaire.

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