mercredi 23 octobre 2013

Découverte musicale du mois

Je vous fais partager une petite musique que j'aime beaucoup et que j'ai découverte il n'y a pas si longtemps. Le morceau est tiré de l'excellent album d'Etrian Odyssey IV composé par Yuzo Koshiro.

Lien :
https://www.youtube.com/watch?v=eTU-jTmWr-k&list=PL40BC111AA2B81B61

Bonne écoute ;)



mercredi 16 octobre 2013

mercredi 9 octobre 2013

dans mon verre d'eau glacée, l'étinsolente

le talon de ta bottine
dans mon verre d'eau glacé
dans la paille entrelacée
sur l'herbe verte que tu piétines
      de toute ta guibole

l'attelage qui reste à l'ombre
à l'ombre l'attelage est sous l'arbre
car l'attelage en a assez !
     de la chaleur qui le piétine

cagnard ! cagnard des plus féroces
cagnard des bannis des bagnards
qui n'ont plus d'ombre
qui n'ont plus d'arbre
et qui rêvent assez
d'un tout petit
     petit verre d'eau glacé



bagnards et forcenés qui se piétinent tout enchainés
comme on martèle le cuir chaud
comme on fait cuir dans le levain
dans d'immondes d'immenses odeurs
d'enfers tout africains Et que faire dans le Levant ?
dans les fours qui sont des geôles ?
et qui sont ces masses avec ardeur ?
avec des danses et des odeurs

fournaise ! bûcher ! autodafé !
ça les empêche de rêvasser
là où l'herbe n'est pas verte
là où l'herbe n'a jamais été verte
là où l'herbe ne sera jamais verte
rien ! défaite sans avenir !
ça c'est l'éclatante victoire de la fournaise ! de la foutaise !

ça est le torrent torride ! et un cigare sur le bûcher
c'est la fumée qui ne fait pas d'ombre
pour les bagnards qui n'ont plus d'arbres
pour les badauds les trébuchés !



échauffourées dans les déserts c'est un
bannis qui prend des airs
d'étincelles intéressées
et une fourche qui n'est pas fraiche
      l'étinsolente ! Soleil et chair !
          échauffourées dans les déserts..

ça l'attelage n'est pas heureux
dans les déserts peu chaleureux
ça l'attelage sous la ferraille
et c'est des arbres qui n'ont pas d'herbes
    la ferraille est un arbre qui n'a pas d'ombre

arbre de mitraille ! arbre des mitards
l'attelage avance parce qu'il fait chaud
parce que la bottine fait mal
dans toute la guibole
     et c'est fâcheux

arbre furibond : une rixe dans le magma
sans ombre et sans herbe, une faucheuse
ça mitraille sur la bagnole C'est grossier ces carosse-
ries et ça ricoche et la rocaille
et bin ça crépite ça caillasse
et ça crapote
et ça ripaille comme des bagnards
à la guibole toute paillassée
dans mon verre d'eau
     petit verre d'eau glacée


jeudi 29 août 2013

Hauteurs du Machu Pichu par Pablo Neruda (Chant XI)


Aigle sidéral, vignoble de brume.
Bastion égaré, cimeterre aveugle.
Ceinture constellée, pain solennel.
Gradins torrentiels, immense paupière.
Tunique en triangle, pollen de pierre.
Lampe de granite, miche de pierre.
Crotale minéral, rose de pierre.
Nef ensevelie, fontaine de pierre.
Cheval de la lune, clarté de pierre.
Equerre équinoxiale, halo de pierre.
Géométrie finale, écrit de pierre.
Névé sculpté au milieu des rafales.
Madrépore du temps au fond des eaux.
Muraille que les doigts ont adoucie.
Faîtage par les plumes combattu.
Bouquets de miroirs, bases de tempête.
Trônes que la liane a jetés à bas.
Régime de la serre ensanglantée.
Ouragan maintenu sur le versant.
Cataracte immobile de turquoise.
Bourdon patriarcal de ceux qui dorment.
Anneau, carcan des neiges dominées.
Fer allongé sur ses propres statues.
Inaccessible et nuageuse tourmente.
Pattes de puma, roche sanguinaire.
Ombreuse tour, controverse de neige.
Nuit qui s’élève en doigts et racines.
Croisée des brouillards, colombe endurcie.
Plante nocturne, statue des tonnerres.
Cordillère essentielle, toit marin.
Architecture d’aigles égarés.
Corde du ciel, abeille des sommets.
Niveau sanglant, étoile élaborée.
Bulle minérale, lune de quartz.
Serpent des Andes, tempes d’amarante.
Coupole du silence, patrie pure.
Aimée du large, arbre de cathédrales.
Gerbe de sel, cerisier : ailes noires.
Neigeuse dentition, tonnerre froid.
Lune égratignée, pierre menaçante.
Chevelure du froid, action de l’air.
Volcan de mains, obscure cataracte.

Vague d’argent, orientation du temps.


© Traduction Pierre Clavilier  



samedi 6 juillet 2013

dimanche 19 mai 2013

Elisée Reclus

Clarens, Vaud, 26 septembre 1885. 

Compagnons, 

Vous demandez à un homme de bonne volonté, qui n'est ni votant ni candidat, de vous exposer quelles sont ses idées sur l'exercice du droit de suffrage. Le délai que vous m'accordez est bien court, mais ayant, au sujet du vote électoral, des convictions bien nettes, ce que j'ai à vous dire peut se formuler en quelques mots. Voter, c'est abdiquer ; nommer un ou plusieurs maîtres pour une période courte ou longue, c'est renoncer à sa propre souveraineté. Qu'il devienne monarque absolu, prince constitutionnel ou simplement mandataire muni d'une petite part de royauté, le candidat que vous portez au trône ou au fauteuil sera votre supérieur. Vous nommez des hommes qui sont au-dessus des lois, puisqu'ils se chargent de les rédiger et que leur mission est de vous faire obéir. Voter, c'est être dupe ; c'est croire que des hommes comme vous acquerront soudain, au tintement d'une sonnette, la vertu de tout savoir et de tout comprendre. Vos mandataires ayant à légiférer sur toutes choses, des allumettes aux vaisseaux de guerre, de l'échenillage des arbres à l'extermination des peuplades rouges ou noires, il vous semble que leur intelligence grandisse en raison même de l'immensité de la tâche. L'histoire vous enseigne que le contraire a lieu. Le pouvoir a toujours affolé, le parlotage a toujours abêti. Dans les assemblées souveraines, la médiocrité prévaut fatalement. Voter c'est évoquer la trahison. Sans doute, les votants croient à l'honnêteté de ceux auxquels ils accordent leurs suffrages — et peut-être ont-il raison le premier jour, quand les candidats sont encore dans la ferveur du premier amour. Mais chaque jour a son lendemain. Dès que le milieu change, l'homme change avec lui. Aujourd'hui, le candidat s'incline devant vous, et peut-être trop bas ; demain, il se redressera et peut-être trop haut. Il mendiait les votes, il vous donnera des ordres. L'ouvrier, devenu contre-maître, peut-il rester ce qu'il était avant d'avoir obtenu la faveur du patron ? Le fougueux démocrate n'apprend-il pas à courber l'échine quand le banquier daigne l'inviter à son bureau, quand les valets des rois lui font l'honneur de l'entretenir dans les antichambres ? L'atmosphère de ces corps législatifs est malsain à respirer, vous envoyez vos mandataires dans un milieu de corruption ; ne vous étonnez pas s'ils en sortent corrompus. N'abdiquez donc pas, ne remettez donc pas vos destinées à des hommes forcément incapables et à des traîtres futurs. Ne votez pas ! Au lieu de confier vos intérêts à d'autres, défendez-les vous-mêmes ; au lieu de prendre des avocats pour proposer un mode d'action futur, agissez ! Les occasions ne manquent pas aux hommes de bon vouloir. Rejeter sur les autres la responsabilité de sa conduite, c'est manquer de vaillance.
Je vous salue de tout cœur, compagnons.

mardi 7 mai 2013


« Quelle journée !
Ce soleil tiède et clair qui dore la gueule des canons, cette odeur de bouquets, le frisson des drapeaux, le murmure de cette révolution qui passe, tranquille et belle comme une rivière bleue ; ces tressaillements, ces lueurs, ces fanfares de cuivre, ces reflets de bronze, ces flambées d’espoirs, ce parfum d’honneur, il y a là de quoi griser d’orgueil et de joie l’armée victorieuse des républicains.
O grand Paris !
Lâches que nous étions, nous parlions déjà de te quitter et de nous éloigner de tes faubourgs qu’on croyait morts !
Pardon ! Patrie de l’honneur, cité du salut, bivouac de la Révolution !
Quoiqu’il arrive, dussions-nous être de nouveau vaincus et mourir demain, notre génération est consolée ! Nous sommes payés de vingt ans de défaites et d’angoisses.
Clairons ! Sonnez dans le vent ! Tambours ! Battez aux champs !
Embrasse-moi camarade, qui a comme moi les cheveux gris ! Et toi, marmot, qui joues aux billes derrière la barricade, viens que je t’embrasse aussi !
Le 18 mars te l’a sauvé belle, gamin ! Tu pouvais, comme nous, grandir dans le brouillard, patauger dans la boue, rouler dans le sang, crever de honte, avoir l’indicible douleur des déshonorés !
C’est fini !
Nous avons saigné et pleuré pour toi. Tu recueilleras notre héritage.
Fils des désespérés, tu seras un homme libre ! »


Jules Vallès, Le Cri du Peuple du 28 mars 1871